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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

contenter de l’espace d’une vie. » — « Hélas, je viens de m’éveiller du rêve que j’étais dans tes bras ! » Et encore ce post-scriptum, piqué de malice, qui l’enflammait par tout ce qu’il lui rappelait de douces choses : « Quand tu attacheras encore mes lacets, pour l’amour du ciel, ne fais plus tant de nœuds ! J’ai passé près d’une heure à les défaire ! »

Un matin, il n’y tint plus et décida de la revoir. Il lui écrirait. Comme il s’asseyait à son bureau pour dépouiller la volumineuse correspondance qui lui apportait les félicitations de ses amis, une enveloppe bleutée attira tout à coup son attention et le fit tressaillir. C’était la lettre secrètement attendue depuis tant de jours, tant de mois !

Pauvre Hania ! Elle succombait donc à son tour. En dépit de sa fierté, elle s’humiliait la première. Il en éprouvait un peu de honte en même temps qu’une émotion délicieuse. Quelle joie de la retrouver !

Ses doigts fébriles rompirent le cachet. Il lut avidement. Ce n’était qu’une brève lettre dépourvue de plaintes et comme empreinte de fatalisme. Après l’avoir félicité de son succès, la jeune femme lui annonçait la mort de sa mère. Dans son affliction et son isolement, le comte de L… lui avait renouvelé sa proposition magnanime. « Je lui ai confessé ma vie, avouait-elle, il excuse, il pardonne. Je porterai bientôt son nom. Quand tu recevras cette lettre je serai déjà loin, aux frontières de mon pays