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IX


Il ne revint pas.

Ce beau visage suppliant qui, dans la pénombre, le regardait avec une expression de tristesse infinie, il sut l’écarter de son souvenir.

La jeunesse est seule capable d’une telle victoire ; au fond de soi, elle sent que rien ne saurait être irrémédiablement perdu puisque toute la vie est encore devant elle. Dans l’âge mûr, la passion a quelque chose de plus désespéré, de plus fatal, qui asservit pour toujours :

Soepe venit magno fœnore tardus amor,
dit le vieux poète dans un raccourci magnifique…

Donc, il s’était arraché le trait du cœur, se roidissait contre la souffrance. Reconquis à l’étude, il s’y consacrait avec toute l’ardeur enfiévrée des anciens jours, prolongeant à dessein ses veilles pour accroître sa fatigue et dormir d’un sommeil de terrassier.

Parfois, dans une pause rêvante, une petite voix murmurait à son oreille :

— Que fait-elle à présent ?

Mais il l’étouffait aussitôt sous une lecture retentissante du Corpus juris.

Michel, qu’il avait retrouvé, se gardait de faire aucune allusion à la Zingara, comme il la