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LE ROMAN D’HIPPOLYTE

tombée et sa figure n’exprimait plus qu’un sombre abattement. Il consentit à l’entendre.

Alors, pleine d’angoisses et d’alarmes, elle s’épancha. Sa mère était pauvre, toujours souffrante. Dans leur détresse, plus profonde de devoir se cacher, un compatriote opulent et titré, qui séjournait à Paris, était venu à leur secours. Il lui avait même offert son nom ; mais éprise de liberté, elle ne s’était pas sentie capable d’enchaîner sa vie à celle d’un barbon si aimable qu’il fût. Un tel sacrifice avait été au-dessus de ses forces. Oh, elle en convenait, sa conduite manquait peut-être de noblesse. Et pourtant, la loyauté ne lui faisait-elle pas un devoir de repousser des liens légitimes de peur de les profaner ? Il lui avait paru plus honnête de conclure un marché ; c’est ainsi qu’un jour, elle était devenue la chose indifférente et passive d’un homme généreux :

— Il comprend mon triste sort et ne m’accable pas de son amour malheureux. Nos entrevues sont rares. Si je n’avais peur de ta moquerie, je dirais qu’il me témoigne une affection quasi paternelle…

Il ne fut pas maître d’un sarcasme :

— Oui, celle de Loth !

— Oh, tu vois ! gémit-elle découragée.

Elle se tut, comprenant qu’elle ne le rendrait pas indulgent, qu’elle ne le persuaderait pas. Le mouchoir pressé sur sa bouche pour étouffer ses hoquets de chagrin, elle attendait qu’il parlât à son tour.