Page:Courouble - Le roman d'Hippolyte (La famille Kaekebroeck), 1927.djvu/101

Cette page a été validée par deux contributeurs.
99
LE ROMAN D’HIPPOLYTE

Et puis, c’était une bande de pierrettes et d’arlequins, le nez et la gorge au vent, l’œil vif, le teint allumé qui assaillaient un pataud de province au large rire et sautaient une ronde autour de son gros ventre.

Soudain, une gentille laitière, échappée de Trianon pour le moins et qui semblait toute pétrie de candeur virginale sous sa « Marie-Antoinette », interpella Ferdinand :

— Oh toi, mon petit, ce que tu dois être cocu !

Mais le cordier, faisant bonne contenance sous l’apostrophe peu fine :

— Tu vois, disait-il à sa femme interdite, c’est à cause de ton petit Werther ! Ah, c’est gai !

La laitière était passée et le jeune homme se félicitait de sa discrétion relative, quand elle reparut soudain, escortée de deux débardeuses en décolleté « grande peau ». Cette fois, ce fut mieux ou pis qu’une escarmouche ; les trois femmes, sans prendre aucun souci du pauvre domino rose, lançaient une pluie de quolibets sur le volage Ferdinand, qui souriait avec héroïsme, quoique très bouleversé qu’on osât lui rappeler ses goguettes extra-conjugales.

En ce moment, combien il enviait le sort de ces paisibles gens qui, nichés au « point de vue », regardaient le bal, d’un peu haut sans doute, mais à l’abri de ces femelles effrontées comme des guenons, sans pitié pour les don Juan de sa sorte.

Mais aussi, quelle imprudence de s’être aventuré dans ce lieu maudit où toutes les rancunes