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peut-être rêvées : voilà seulement que le marmot venait de leur être apporté et qu’il commençait à vivre pour la joie de leur vieillesse.

Inclinés sur le poupon, ils échangeaient presque un sourire dans l’oubli momentané du drame affreux qui les avait terrassés ; car ils n’étaient pas de cette sorte de vieilles gens qui se déshumanisent avec l’âge et reprennent leur égoïsme d’enfant à la fin d’une longue vie…

Mais le bébé venait d’étendre ses petits bras dont les menottes s’agitaient hors de la voiture. Une amusante grimace sillonna sa figure et, soudain, il ouvrit les yeux.

— Bonjour le nouseke, s’exclama doucement la bonne dame d’une jolie voix de grand’mère, et comment ça va ? Vous avez bien dormi ?

L’enfant la regarda fixement, puis sa frimousse s’épanouit tout à coup dans une ineffable expression de plaisir.

— Je suis sûr qu’il a faim, dit le quincaillier en lui chatouillant le menton. Un peu de patience, mon gaillard. La maman va venir… Et tenez, la voilà !

Et c’était Adélaïde oui entrait avec impétuosité en secouant un biberon dans sa main :

— Il a été sage ? interrogea-t-elle. Vous n’avez pas eu trop d’embarras avec lui ?

Elle s’excusa d’être un peu en retard, mais ce n’était pas sa faute : le soleil donnait encore une fois sur la cheminée et le poêle ne tirait pas : impossible de faire chauffer le lait au bain-marie…

Jamais son rustique visage n’avait relui d’un