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ne lui semblait pas possible que la maîtresse charbonnière consentît jamais à l’heureuse conclusion de cette idylle, en admettant que la guerre ne vint pas la dénouer brutalement.

Cependant Martha était rentrée, portant sur un plateau le frugal repas du soir. Elle servit son père qui, malgré son esprit soucieux, se mit à manger d’assez bon appétit. Mais le brave homme s’inquiéta bientôt de l’abstinence de sa fille :

— Voyons, chère, il faut prendre au moins quelque chose… Force-toi un peu sinon tu ne résisteras pas…

Elle le pria de ne pas s’alarmer :

— Je t’assure, Pa, que je n’ai pas faim. Du reste, on m’a forcé de goûter à la quincaillerie…

Et, surmontant sa peine :

— Oh ! tu ne peux te figurer comme il est beau, le petit garçon d’Adelaïde !

Elle s’anima légèrement à l’évocation du nourrisson, dont la belle santé et la gourmandise amenaient presque un sourire sur ses lèvres. Car auprès d’un enfant, s’apaise toujours le plus violent chagrin.

— Et les pauvres vieux ? interrogea le coiffeur d’un air attendri. Est-ce qu’ils commencent à se remettre un peu ?

Elle ne les avait pas vus cet après-midi, mais, selon ce que Bernard lui avait rapporté, les patrons semblaient se résigner et reprendre courage, surtout avec ce nouveau petit Prosper soudainement apparu dans la maison. Par exemple, un surcroît dans leur malheur, c’était la dispa-