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— Et une image que j’ai précieusement gardée, ajouta le vieillard en ouvrant d’une main fébrile un portefeuille déposé sur la table. La voici !

— Mon portrait ! s’écria-t-elle dans un sanglot.

— Oui, ma chère fille, c’était votre fiancé ! Et c’était le fils de mon frère bien-aimé ! Bientôt vous saurez tout !

Cependant, redressée, les yeux agrandis par la stupeur, Camille écoutait le vénérable missionnaire dont les paroles pénétraient moins dans son esprit qu’elles n’impressionnaient ses oreilles par une résonance qui évoquait la douceur d’une voix chérie. Et voilà que dans les traits, dans les gestes, dans toute la personne du vieillard elle découvrait à présent cette ressemblance qui, dès le premier abord, l’avait tant obsédée sans qu’elle eût jamais été capable de l’identifier à un type précis. C’était son amant que cet homme lui avait confusément rappelé à la suite de sa visite…

— Oh ! mon père, dit-elle en sortant de sa prostration, je comprends aujourd’hui… vous ne pouviez tout dire à notre première rencontre. Je me souviens… Ce blessé moribond, vous aviez dû l’abandonner, disiez-vous, à la garde des brancardiers… Mais ce n’était pas vrai, ce n’était pas vrai ! Non, vous n’avez pas abandonné votre neveu, presque votre fils !

— Chère Camille ! Oui, je suis demeuré auprès de l’héroïque soldat. Je l’ai assisté… Je l’ai ramené dans nos lignes avec son ami De Bouck… Et nous l’avons veillé pendant de longs jours…