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coup les bons quincailliers. Mais ce ne fut qu’une alerte ; Mme Lust guérit promptement et n’en redevint que mieux portante dans la suite. Il semblait même que sa taille eût une tendance à s’élargir et que son corsage, encore plus avantagé que jadis, voulût faire sauter ses boutons ; si bien qu’un beau matin, Mme Claes, qui époussetait avec elle dans la salle à manger, lui dit brusquement :

— Tournez-vous une fois Adélaïde… Est-ce que c’est une idée, mais on dirait que vous êtes en…

— Et bien oui, avoua la vaillante fille en riant, je crois que ça sera pour le mois de mars…

Elle avait quarante-trois ans et Lust naviguait au milieu de la cinquantaine. Cette grossesse inespérée était un cas de fécondité tardive mais nullement improbable ; dans la tristesse des jours, elle apporta quelque contentement à tout le monde et ce fut une grande diversion pour la vieille quincaillière que d’avoir à s’occuper de la layette du futur bébé qui ne pouvait être, bien entendu, qu’un gros garçon auquel on donnerait le nom de Prosper.

Malgré son état, Mme Lust grosse à pleine ceinture, continuait à se démener comme si de rien n’était ; le travail entretenait sa belle santé et le docteur Buysse n’y voyait aucun mal.

— C’est cela, remuez-vous, ma bonne Adélaïde, encourageait-il, c’est encore ce qu’il y a de mieux pour que le petit entre facilement dans le monde !