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Il voulait s’y opposer, mais Camille reconnaissante, tenait à le reconduire :

— Oh, merci, Monsieur. Je vous souhaite de rentrer sain et sauf dans votre famille…

Le soldat parlait d’une voix grave et douce :

— Moi aussi, j’ai une fiancée… Est-ce que je reverrai jamais ma pauvre Anny ? J’avais deux frères. Ils sont tombés à Verdun. Je reste le seul fils. Dans quelques jours je repars pour le front. S’il m’arrive malheur que deviendront les vieux parents ? Ah ! c’est une triste époque, Mademoiselle, une bien triste époque pour tout le monde !

Devant la porte du magasin, il la pria de ne pas l’accompagner davantage et, ôtant son calot, il la salua profondément :

— Adieu !



La brutalité des soldats qui se livraient à des perquisitions avait jeté la terreur dans le quartier ; aussi n’est-ce pas sans une grosse appréhension que les Claes attendaient leur visite.

Cette fois, ils respiraient. Personne dans la quincaillerie qui ne demeurât stupéfait du tact des argousins militaires dont l’un surtout s’était montré d’une délicatesse incompatible avec sa nationalité…

Adélaïde ne put retenir ses larmes en apprenant que le soldat avait salué la chambre de Prosper :