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— Non ! ce n’est pas cela, ce n’est pas cela !

— Alors quel motif ?…

Elle se décida à l’aveu :

— Écoutez-moi, Monsieur : cette chambre est celle de mon fiancé…

— Et bien ?…

— Il est à la guerre…

Une expression de profonde tristesse passa sur la physionomie du soldat :

— Il suffit, Mademoiselle. Non, je ne dois pas entrer là. Je comprends… je comprends. Rassurez-vous…

Il semblait ému, très touché lui-même.

Alors, avec intérêt :

— Ainsi votre fiancé est à la guerre… Dans l’armée active ? Parmi les combattants ?

— Oui, au neuvième de ligne. Parti simple soldat, il est aujourd’hui sous-lieutenant…

— Ah ! c’est un brave, et je vous félicite. Me permettez-vous de demander s’il y a longtemps que vous avez reçu de ses nouvelles ? J’espère qu’il est en bonne santé…

À ces mots, et quelle que fût son héroïque résolution à mentir, Camille ne put surmonter son émotion et éclata en sanglots.

La figure du jeune homme se contracta :

— Pardonnez-moi…

Et soudain, prenant la position militaire, il salua respectueusement la chambre de l’adversaire tombé dans la bataille. Puis, se tournant vers la jeune femme soulagée et tout attendrie :

— Ma mission est terminée, je me retire.