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que les points intermédiaires y échapperaient ; et en tout cas les observations peuvent être assez multipliées pour exclure à cet égard tout doute raisonnable. On en induira encore avec une grande probabilité, ou avec une quasi-certitude, que le tracé de la courbe décrite par le point mobile suit la même loi, est le prolongement de la même parabole ou de la même hyperbole, un peu en deçà et un peu au delà des points extrêmes donnés par l’observation : car comment admettre que les circonstances fortuites ou tout à fait indépendantes de la marche du mobile, qui nous ont fait commencer et finir nos observations en tel point plutôt qu’un tel autre, nous aient donné pour points extrêmes précisément ceux où le mobile commence et cesse d’être assujetti à la loi simple qui relie entre elles toutes les positions intermédiaires ? Mais, plus on dépasse les limites de l’observation, plus l’induction devient incertaine, puisque la raison n’a aucune peine à admettre que les lois qui président au mouvement du mobile se modifient brusquement ou par degrés insensibles, ou bien encore se compliquent, par suite de l’intervention de causes perturbatrices qui n’avaient pas d’action sensible dans la région intermédiaire où se sont concentrées les observations. Lors même que les points donnés par l’observation n’appartiendraient pas à une courbe remarquable par la simplicité de sa définition, si ces points sont suffisamment rapprochés et qu’on les lie par un trait continu, il deviendra très-probable que le tracé de la courbe effectivement décrite par le mobile s’écarte peu, dans un sens ou dans l’autre, de la ligne ainsi menée ; et la probabilité qu’il en est ainsi aura d’autant plus de force que les points observés indiqueront par leur disposition une allure plus régulière dans la marche du mobile ; car, si la ligne effectivement décrite avait de notables irrégularités, comment admettre que le hasard eût fait tomber précisément sur les points dont le système dissimule ces irrégularités notables ? Il reste pourtant infiniment peu probable qu’on ait rigoureusement suivi la véritable trace de la courbe, et l’induction très-probable ne porte que sur une approximation. Mais quelle est la probabilité qu’on n’ait pas dépassé telles limites d’écart ? Comment varie-t-elle avec les intervalles des points déterminés d’une manière exacte, et avec l’allure indiquée par leur disposition d’ensemble ? Ce