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les observations eussent donné la suivante 24, 102, 405, 1597. L’idée qui viendrait alors, c’est que les effets réguliers d’une cause constante et principale se compliquent des effets de causes accessoires ou perturbatrices, qui peuvent elles-mêmes être soumises à des lois régulières, constantes pour toute la série des valeurs observées, ou varier irrégulièrement et fortuitement d’une valeur à l’autre. Mais la probabilité qu’il en est ainsi se lie évidemment à la probabilité de l’existence d’une loi régulière dans le cas plus simple que nous avons considéré d’abord ; et elle ne saurait, plus que celle-là, comporter une évaluation numérique.

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Pour sortir un peu du champ de l’abstraction et des fictions, reportons-nous à l’époque ou Kepler, après une multitude d’essais pour démêler une loi dans les nombres qui expriment, d’une part les distances des planètes au Soleil, d’autre part les durées de leurs révolutions, reconnut enfin que les durées sont proportionnelles aux racines carrées des cubes des distances. Voilà une loi arithmétique assez compliquée dans son énoncé et qui ne s’appliquait qu’aux six planètes alors connues. C’était peut-être le cas de demander si ce rapport singulier, dont rien ne pouvait faire entrevoir alors la raison, que Kepler n’avait trouvé qu’à force de tâtonnements, poussé par des idées pythagoriciennes, dès lors suspectes aux bons esprits, ne se rencontrait pas par hasard, et parce qu’il faut bien qu’on finisse par trouver une loi mathématique propre à relier entre eux des nombres quelconques, fortuitement groupés. Il semble que les astronomes de son siècle en aient jugé ainsi ; et, nonobstant la découverte des satellites de Jupiter, qui donnait lieu de vérifier, sur ce système particulier, la loi observée dans le système planétaire, la troisième loi de Kepler (comme on l’appelle) a peu fixé l’attention, jusqu’à ce que la grande découverte de Newton eût fait dépendre cette loi, avec tant d’autres résultats de l’observation, du principe de la gravitation universelle. Kepler avait aussi été frappé d’un rapport singulier que lui présentait le tableau des distances des planètes au Soleil. Si l’on range les planètes alors connues (Mercure