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DE LA PSYCHOLOGIE. 531

propriétés mécaniques de la poudre, certaines lois de physique et de chimie, qui n’ont point de relation avec la dépense de force appliquée à la fabrication de la poudre. Cette dépense a été simplement une des conditions pour mettre en présence et en contact intime les matières du mélange explosif, pour rendre ultérieurement possible ce déploiement de force mécanique que la nature a attaché à la réaction chimique des éléments du mélange, sous l’influence d’un point en ignition.

Pareillement, lorsque la poudre sera employée dans les travaux des mines, il faudra dépenser une certaine quantité de force pour pratiquer des cavités, y introduire et y tasser la poudre, en approcher la mèche enflammée ; mais il n’y aura d’ailleurs aucun rapport entre la dépense de force appliquée à ce travail et les effets mécaniques que la détonation produira ; cette dépense ne déterminera pas la production ultérieure de force, due à l’expansion des gaz qui s’engendrent par l’inflammation de la poudre ; elle sera seulement une des conditions pour que ce déploiement de forces, dont la raison est dans des lois physiques d’un ordre spécial, s’effectue avec production d’un effet utile. Une force aura été consommée, une autre force aura pris naissance, "mais celle-ci ne sera pas la première force transformée ; le passage de l’une à l’autre ne s’expliquera point par les seules lois de la mécanique, par celles qui suffisent dans l’explication du jeu d’une machine proprement dite ; il faudra faire intervenir une action naturelle qui a ses lois propres et sa raison spéciale d’existence.

Une machine à vapeur que la houille alimente est employée à extraire de la houille du sein de la terre et à l’amener à la surface du sol. En un sens, cette machine régénère la denrée qu’elle consomme ; elle absorbe de la force et elle en crée, puisque, en vertu des propriétés des substances gazeuses, toute source de chaleur équivaut à une source de force mécanique. Mais on ne peut pas dire en pareil cas qu’il y ait trans- formation de la force dépensée. Le rapport qui subsiste entre la dépense de la machine et son effet utile tient à des circonstances accidentelles ou fortuites. La même dépense de combustible et de force aurait pu être appliquée à remonter à la même hauteur des matières du même poids, et qui ne jouiraient nullement de la propriété de régénérer de la chaleur ou de la force.