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SUR LE PRÉTENDU MONOTHÉISME DES ANCIENS CHINOIS

dynastie des Tshin ouvre pour la religion une période de syncrétisme et de systématisation sur laquelle Seu-ma Tshien donne des renseignements[1] ; l’apparition de ces idées nouvelles marque naturellement la limite inférieure de mes recherches.

J’ajouterai que, même dans ces temps reculés, l’on n’a jamais sous les yeux un monothéisme absolu ; il suffit d’ouvrir le Chi ki, le Tso tchoan, le Chou king pour trouver mention, dès le berceau du peuple chinois, de divinités de nature très diverse et pour distinguer des tendances fétichistes, naturalistes, animistes. Je me bornerai à citer comme exemples la pierre parlante de Tsin au VIe siècle (Chin. class., vol.  V, p. 622, §§ 1, 2, 4, 5), le joyau de Tchhen à partir du VIIIe siècle (Mém. hist., vol.  II, p. 17), les ancêtres et les dieux de la terre déjà invoqués par Khi, fils de l’empereur Yu (Kan chi, Chin. class., vol.  III, p. 155), les montagnes, les fleuves, les esprits auxquels l’empereur Choẹn offre des sacrifices (Choẹn

    plus anciens, sont de beaucoup postérieurs à ces faits prétendus historiques ; ainsi le Choẹn tien a dû être composé sous les Tcheou dont il relate les coutumes féodales ; le Yu kong, purement descriptif et géographique, donc bien difficile à dater, est peut-être en partie antérieur au Choẹn tien. Les livres réellement les plus anciens, plus vieux que les deux que j’ai cités, seraient le Kan chi, le Thang chi, le Phan keng ; on ne saurait d’ailleurs les rapporter aux dates admises dans la chronologie orthodoxe des lettrés ; on peut les croire antérieurs aux Tcheou, c’est-à-dire au IXe siècle. On voit que le Chou king nous ramène à peu près à la même antiquité que le Chi king.

    Le Tso tchoan (Commentaire de Tso sur les Annales de la principauté de Lou), postérieur à 424 a. C., est antérieur à la chute des Tcheou (cf. Chin. class., vol.  V, Prolog., chap. 1, sect. IV) : c’est une histoire de la période comprise entre 722 et 463.

    Quant aux Quatre Livres, Seu chou, les deux premiers sont attribués à des disciples rapprochés de Confucius ; le Meng tseu est de l’école du sage dont il porte le nom (372-289) ; quant au Loẹn yu, il a été retrouvé et reconstitué au début des Han dans des conditions analogues au Chou king.

    Le Chi ki (Mémoires historiques), œuvre de Seu-ma Than et de son fils Seu-ma Tshien, a été rédigé en grande partie avant l’an 99 a. C.; certains passages sont postérieurs à cette date, mais dans le nombre il y a sans doute quelques interpolations.

  1. Voir le livre XXVIII (tome III, p. 413, de la traduction de M. Chavannes).