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très généraux, si elle a eu aussi des processions où des personnages costumés en bêtes fauves fantastiques feignaient de poursuivre et de chasser les esprits des épidémies, je ne nie pas que ces cérémonies aient quelque rapport avec le théâtre, mais ce rapport est lointain. Le goût des ballets et des processions s’est perpétué à la cour et dans le peuple, malgré les changements de dynasties et les dominations étrangères, mais c’est tardivement, à la fin du viie siècle de notre ère, que ces divertissements prirent à la cour un développement inattendu. À cette époque de civilisation raffinée, les « barbares » de l’Asie centrale venaient fréquemment porter leurs hommages à l’Empereur : on imita leurs danses, leur mimique, on leur emprunta même leurs instruments, on copia leur musique. Un célèbre souverain du viiie siècle, Ming-hoang, était passionné pour ces amusements étrangers ; il instruisait lui-même musiciens et danseurs dans un de ses palais, célèbre jusqu’aujourd’hui sous le nom de Jardin des Poiriers, et c’est à lui que les Chinois font remonter l’invention de leur art dramatique. Le drame hindou aurait ainsi exercé jusqu’en Chine une légère influence. Mais ces premières tentatives scéniques étaient encore loin du drame, et il fallut plusieurs siècles et des invasions étrangères pour que l’esprit chinois, qui se plaît aux dissertations et aux récits, arrivât, et avec peine, à la synthèse nécessaire au drame : c’est sous la dynastie mongole, aux xiiie et xive siècles, qu’ont été écrites la plus grande partie des pièces chinoises et composés les airs qui les accompagnent. Depuis lors, la vogue du théâtre est allée en croissant, mais la production scénique a diminué, et aujourd’hui l’on ne compose presque plus de pièces nouvelles ; la littérature dramatique est arrêtée dans son évolution, sans même avoir atteint son entier développement, sans être complètement dégagée du ballet et du récit d’où elle est sortie.

Sur un sujet aussi complexe et aussi négligé des écrivains chinois, il est difficile présentement de déduire des conclusions ; qu’il me soit néanmoins permis de présenter quelques hypothèses. L’esprit chinois, semble-t-il, est peu doué pour le drame : il note patiemment les détails, mais perçoit mal l’ensemble ; les images restent fragmentées et ne s’organisent