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DE L´UTILITÉ DES ÉTUDES CHINOISES



« Exposez-donc à nos lecteurs avec quelque détail quelle est l’utilité des études chinoises » : telle est la requête que m’a adressée, avec une aimable insistance, le rédacteur en chef de cette Revue. Ce désir en lui-même mérite qu’on le remarque : si l’on veut savoir à quoi servent les études chinoises, n’est-ce pas qu’on admet a priori qu’elles servent à quelque chose ? Il y a bientôt quinze ans, à l’époque où mon ami M. Chavannes, moi-même et deux condisciples aujourd’hui disparus, nous nous sommes rencontrés aux cours de l’École des Langues Orientales, on n’eût pas songé à poser cette question : apprendre le chinois, on l’admettait implicitement, ne pouvait être que la préparation professionnelle de quelques interprètes, pour tout autre c’était la marque d’un esprit au moins bizarre ; il ne venait pas à l’idée que les Chinois avec leurs formes sociales et leur histoire, sont dignes de l’attention du penseur. Puisque l’opinion a changé, puisque les études chinoises dirigées plus sérieusement attirent des disciples plus nombreux, essayons de préciser ce que nous sommes en droit d’attendre d’elles.

Les immenses vallées du Yang-tseu et du fleuve Jaune, celles plus étroites, vastes encore, de la rivière de Canton et du Pei-ho appartiennent à la civilisation chinoise, trois cents millions d’hommes y sont façonnés par elle ; mais l’aire où domine son influence est plus que double de celle où elle règne sans conteste : le Japon, la Corée, l’Annam ont reçu son empreinte ; son empire politique ou moral s’est affirmé, avec une énergie différente suivant les temps et les