Page:Coupin - Essai sur J. L. David, peintre d'histoire, 1827.djvu/8

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était né. Sa mère le chargea un jour de porter une lettre à Boucher, son parent, dont le nom seul réveille le souvenir d’ une époque où le mauvais goût avait perverti l’école. Le peintre était dans son atelier, terminant, je crois, une Vénus: il quitte ses pinceaux pour lire la lettre ; lorsqu’il a fini, il se retourne et voit le jeune David absorbé dans une sorte de contemplation que son âge rendait encore plus remarquable. Après l’avoir considéré quelque temps, il lui adresse la parole, et lui demande s’il aime la peinture. Le jeune homme répondit avec un accent et une émotion qui décelaient une vocation que rien ne saurait détourner. Sa mère, cédant enfin à un penchant si décidé, ainsi qu’aux sollicitations de Boucher, pria celui-ci, alors premier peintre du roi, de recevoir son fils dans son école; mais Boucher, supérieur par son esprit aux mauvais peintres de son temps, sentait, tout en sacrifiant à la mode un talent réel, ce qu’il y avait de faux et de dangereux dans sa manière ; il fit une chose tout à-la-fois judicieuse et honorable : il confia le jeune David aux soins d’un autre maître. Vien, chez lequel il le conduisit, avait un sentiment du beau et du vrai qui contrastait avec son époque : il prit son élève en affection, et les arts doivent se féliciter de cette heureuse circonstance; car c’est à Vien que l’on doit David, comme c’est à David que l’on doit l’éclat dont l’école a brillé depuis près d’un demi-siècle. [9]