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édition, et dont on fait grand cas, il demande si cela fera amender le pain et le vin[1]. Il fait une réponse analogue à un huguenot qui veut l’intéresser aux controverses. Quand on lui dit que Gaumain a déchiffré le punique et vient d’écrire le Pater en cette langue, « il prononce une douzaine de mots qui n’étoient d’aucune langue, et dit : « Je vous soutiens que voilà le Credo en langue punique : qui est-ce qui me pourra dire le contraire[2] ? » Il s’expliquait volontiers tout au long à ce sujet : « Il parloit fort ingénument de toutes choses, et avoit un grand mépris pour les sciences, particulièrement pour celles qui ne servent que pour le plaisir des yeux et des oreilles, comme la peinture, la musique et même la poésie[3] ». Pour parler ainsi, il n’avait encore une fois qu’à se souvenir de l’épître 95, qu’il avait traduite : « Quelques-uns ont fait cette question : si les arts libéraux pouvoient faire un homme de bien[4]. Et tant s’en faut que cela soit, ils ne le permettent pas seulement… Venons aux professeurs de géométrie et de musique : vous trouverez aussi peu ces leçons (les leçons morales indispensables à l’homme) chez eux que chez les grammairiens[5] ». La seule science, la seule étude qui

  1. Racan, l. c., p. LXIX.
  2. Ibid., LXX.
  3. Ibid., LXXVII.
  4. On voit que cette question avait été posée longtemps avant l’Académie de Dijon, et que Sénèque y avait répondu avant Rousseau, qui s’est abondamment souvenu du philosophe latin : la « philosophie renouvelée d’Omar », que Volney reproche à Rousseau, est plutôt une philosophie renouvelée de Sénèque.
  5. Malh., II, 687. De même P. 686 : « Ce sont métiers mercenaires, qui préparent l’esprit s’il passe par-dessus, et le gâtent s’il y croupit ». Cette célèbre épître porte dans Malh. le no LXXXVIII, qu’elle a encore dans la traduction allemande de Lehmann (1816).