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bon état que, si mon affection ne me trompe, le vieux mot εύρήκαμεν, συγχαίρωμεν ne fut jamais dit si à propos comme nous le pouvons dire aujourd’hui… D’un côté son corps (de Richelieu) a la faiblesse de ceux qui άρούρας καρπόν έδουσιν ; mais de l’autre, je trouve en son esprit une force qui ne peut être que τῶν ὀλύμπια δώματ’ἔχόντων[1] ». Malherbe aime donc à se souvenir de l’Évangile et d’Homère, et il fait encore allusion à un récit de l’Iliade en écrivant à Balzac[2]. Son œuvre poétique ne se ressent pas, pour cela, de l’épopée ni de la théogonie grecque. Parlant d’Achille, il le fait « soupirer neuf ans dans le fond d’une barque[3] ». C’était beaucoup plus que ne permettait l’Iliade : et Ménage, en publiant les vers de Sarasin qui reprenaient la même erreur, dut réduire les soupirs à neuf mois. Il est vrai que Malherbe en usait très librement avec les traditions poétiques. Quant à Hésiode, on a voulu voir un souvenir de la Théogonie dans le passage de l’Ode sur la rébellion de La Rochelle où la Victoire triomphe des Titans[4] : mais c’est là une fiction assez répandue pour que l’auteur ait pu se passer de l’original grec. De même qu’il avait pu entendre plus d’une fois dans les harangues et sermons du temps le passage de l’évangile grec auquel il semble faire allusion, il avait aussi pu rencontrer la sentence d’Hésiode qu’il cite, dans un de ces recueils comme il en paraît tant alors[5], et qu’il connaît bien, puisque la même année où

  1. IV, 104 et 109. Évang. selon St Luc : Συγχαίρητέ μοι, ότι εύρον (XV, 6 et 9) ; Iliade VI, 142, et I, 18.
  2. IV, 91.
  3. I, 305.
  4. I, 280.
  5. Voir notamment Egger, L’hellénisme, t. II, p. 36 et 37 et note.