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CHAPITRE IV.

Les Grecs.


En 1569, « on accorde ce principe que la langue grecque est la reine des langues »[1]. Un siècle plus tard, si vous ne savez pas le grec, Philaminte ne vous embrassera pas, mais aussi vous ne serez pas traité de grimaud[2]. Que s’est-il donc produit dans l’intervalle ? Une désillusion, à la suite d’une entreprise démesurée. On avait cru, au début de la Pléiade, que l’imitation des Grecs allait procurer à la France un Homère et un Pindare, et comme, au bout d’une ou deux générations, il avait bien fallu reconnaître qu’il n’en était rien, une réaction devait se produire contre les anciens mêmes en qui on avait mis tant d’espoir. Il en est toujours ainsi : Pompignan fait tort à Jérémie, et le pindarisme à Pindare. Le grec ne fut toutefois pas abandonné : on le confina seulement dans les collèges, refuge ordinaire des traditions démodées, et au commencement du xviie siècle, le Louvre, pour lequel Malherbe a écrit presque toute son œuvre, fait encore bon accueil aux études grecques[3]. Mais celles-ci n’ont plus d’influence sur la littérature nationale. On en parle avec le respect des choses aux-

  1. Henri Estienne, Conformité de la langue grecque, éd. Feugère, p. 18.
  2. La Bruyère, Des jugements, 19.
  3. Cf. Egger, L’hellénisme en France, t. II.