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place prise par les Normands au commencement du XVIIe siècle et déjà dès la fin du XVIe. Un rimailleur d’alors s’écriait :

Ô Can fertile en beaux esprits
..........
Ô que tu dois être superbe,
Produisant trois soleils nouveaux,
Mon Bertaut et des Yveteaux,
Et l’incomparable Malherbe[1].

Un peu plus tôt, en 1598, un inconnu — qui ne mentionne pas encore Malherbe — attribuait à l’invention « de Du Perron ou de Bertaut » les stances qui, dit-il, se répandent de plus en plus, et remplacent le sonnet qui était autrefois en honneur. Ni Du Perron ni Bertaut n’étaient les inventeurs ; mais l’erreur même que commet un contemporain[2] nous montre en eux les représentants notoires de la poésie du temps, et dans la stance une forme favorite de cette poésie. Cette forme, Malherbe la reprendra — Racan nous a dit l’importance qu’il y attachait — et il est frappant de voir les chœurs des tragédies

  1. Paranymphes. À M. de Malherbe (cité par Brunot, La doctrine, de Malherbe, p. 530, et Grente, J. Bertaut, p. 371). Plus tard Mme de Sévigné (t. IX, p. 42, lettre du 5 mai 1689) appelle Caen « la source de tous nos plus beaux esprits » ; — « Monsieur *** disoit que l’on faisoit des vers dans les autres endroits de la France, mais qu’on en tenoit boutique à Caen. » (Œuvres de Segrais, II, 33-34.) — Il y a une restriction à faire sur la ville natale de Bertaut (voy. Grente, o. c.).
  2. Manuscrit (Bibl. nat., ms. fr. 881) décrit par P. Paris, Manuscrits français, VII, 95 sqq. cité par Rathery, De l’influence de l’Italie, p. 111, n. 1, par Allais, Malherbe et la poésie française, p. 412 (appendice). Cf. Allais, ibid., p. 250, et Grente, Bertaut, p. 346 et 347 : Pierre Delaudun d’Aigaliers (Art poétique publié en 1598) dit que « les stances ne laissent pas maintenant d’être en vogue »; Colletet} (Discours sur le sonnet) constate que « le cardinal du Perron, Jean Bertaut, évéque de Sées et