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aura pour imitateur un autre de ses concitoyens, Sarasin[1]. Plus tard, dans la société des cinq auteurs de Richelieu, trois sont normands ; les Normands forment une bonne partie des premiers académiciens ; ils sont encore un parti puissant sous la direction de Thomas Corneille[2]. S’ils ne s’enrichissent pas tous à faire des vers, Scudéry — qui d’ailleurs n’est pas un Normand de vieille souche — se montre le plus habile des entrepreneurs de romans, et est prêt — comme Malherbe dans un autre ordre d’idées — à soutenir toutes les causes. Enfin Chapelain restera le dispensateur des faveurs royales. Ces Normands réussissent partout par leur talent et leur souplesse.

Ils ne sont jamais paresseux
À louer les vertus des hommes,


comme dit Malherbe de lui-même[3], — nul ne l’était d’ailleurs en ce temps-là —. Ils font l’éloge des puissants du jour, et le font parfois en termes grandioses. Duperron vantait Catherine de Médecis presque comme Malherbe fera Henri IV, et il complimentait si bien le nouveau monarque que Régnier ne dédaigna pas d’imiter ses Stances sur la venue du roi à Paris[4]. Malherbe s’élèvera plus haut encore, et il arrivera au chef-d’œuvre du genre dans la Prière pour le roi allant en Limousin.

Les contemporains n’ont pas laissé de remarquer la

  1. Cf. A. Mennung, J.-Fr. Sarasin’s Leben und Werke, 2 vol. (1902-1904).
  2. Voyez Morillot, La Bruyère (Collection des grands écrivains), p. 46.
  3. Malherbe, I, 286 (Ode à Lagarde). Le même aveu est aussi bien, d’ailleurs, chez Desportes (éd. Michiels, p. 516, et encore chez Balzac (lettre du 27 novembre 1645).
  4. Vianey, Mathurin Régnier, p. 266.