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CONCLUSION


Avant de conclure, il n’est peut-être pas inutile de faire encore, à tous les rapprochements que nous venons d’établir, les restrictions qui n’auraient pas paru assez fréquentes et assez explicites au cours de cette étude. On ne devrait pas commencer un travail de critique comparative sans réciter les vers de Namouna :

Rien n’appartient à rien, tout appartient à tous…


et M. Brunetière[1] rappelait encore dernièrement que rien n’appartient exclusivement à un auteur isolé, ni même à une seule littérature, mais que tout relève de la « littérature européenne », dont les littératures nationales ne sont que les provinces. En ce qui concerne Malherbe, les idées générales qu’il exprime et les images qu’il emploie peuvent, au point de vue d’aujourd’hui, sembler si banales et si vieilles que tout rapprochement fait à leur sujet reste une hypothèse quant à leur véritable origine. Il faut dire aussi qu’entre le simple plagiaire et l’écrivain le plus spontané il y a toute une série de degrés, et qu’une influence littéraire peut s’exercer par des réminiscences inconscientes, par des souvenirs fugitifs aussi bien que par une gauche copie. Mais d’autre part il ne faut pas oublier que l’état d’esprit d’un homme de l’an 1600 diffère du nôtre en cette matière : depuis trois siècles les images et les pensées se sont toutes usées ; elles nous sont venues de côtés si divers et d’auteurs si

  1. Dans la Revue des Deux Mondes, 1903, à propos de G. Huszar, Corneille et le théâtre espagnol (1903).