Régnier se rapproche de Malherbe par l’un des côtés principaux de l’œuvre du réformateur : la forme du vers, la concision, l’habileté à enfermer la pensée la plus complète dans le cadre le plus ferme et le plus limité.
On sait que Malherbe « l’estimoit en son genre à l’égal des Latins[1] ». Dans les vers du satirique, « soutenus, nombreux, détachés les uns des autres[2] » — ce sont les qualités que Brossette reconnaît à Régnier, et ce sont exactement celles de Malherbe — il y avait aussi à glaner, et le neveu de Desportes parle comme parlera l’ennemi de son oncle, des vieux contes d’honneur :
Ces vieux contes d’honneur dont on repaist les dames
Ne sont que des appas pour les débiles ames
Qui sans choix de raison ont le cerveau perclus[3].
Ces vieux contes d’honneur, invisibles chimères,
Qui naissent aux cerveaux des maris et des mères,
Etoient-ce impressions qui pussent aveugler
Un jugement si clair[4] ?
Toutes ces tirades dont Régnier trouva la formule lapidaire[5] remontaient aux mêmes sources italiennes, et on ne peut guère dire quelle part revient, dans les vers de Malherbe, aux poètes français plutôt qu’aux Italiens.