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saisons[1]. La plus fameuse de ses images surtout est une image du seizième siècle. Il n’y a peut-être pas dans la littérature française de tradition moins interrompue que la comparaison de la jeune fille à la rose[2] : elle fait les frais du Roman de la rose, la seule œuvre du moyen âge qui surnage complètement à travers toute la Renaissance, et dont on peut suivre l’influence jusqu’à Mademoiselle de Scudéry. Baïf, qui présente l’un des antécédents de la célèbre stance à du Périer, écrit encore des vers Au Roy sur le Roman de la Rose[3] ; et l’on sait l’estime qu’avaient pour l’œuvre de Guillaume de Lorris et de Jean de Meung, et Ronsard et du Bellay[4]. En outre, la brièveté des roses était un lieu commun dans toutes les littératures[5] :

  1. Je dy ce grand Soleil qui nous fait les saisons
    Selon qu’il entre ou sort de ses douzes maisons.

    Ronsard, VII, 56.

    Vive source de feu qui nous fait les saisons
    Selon qu’il entre ou sort de ses douze maisons

    id., V, 16.

    Selon que le Soleil se loge en ses maisons,
    Se tournent nos humeurs ainsi que nos saisons.

    Régnier, Sat. IV, 113.

    Certes l’autre soleil, d’une erreur vagabonde,
    Court inutilement par ses douze maisons ;
    C’est elle et non pas lui, qui fait sentir au monde
    Le change des saisons.

    Malh., I, 157

    Voy. J. Vianey, Mathurin Regnier (1896).

  2. Cf. Sully Prudhomme, Stances et Poèmes, I, p. 8 :

    Nous n’osons plus parler des roses :
    Quand nous les chantons, on en rit.

  3. Baïf, éd. Becq de Fouquières, p. 255
  4. Voy. Revue d’histoire littéraire de la France, 1902, p. 218 (Les sources françaises de Ronsard, par H. Guy).
  5. Voy. Ch. Joret, La rose dans l’antiquité et au moyen âge, p. 56-59. — Cf. encore Wace, Roman de Rou, v. 65 et sv. :

    Tute rien se turne en declin
    .........
    ....rose flaitrist.