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paroit par ces vers que Berthelot fit contre lui, au sujet de cette chanson[1] ». Comment connaissait-on la pièce de Gongora « dans la chambre de Mme de Bellegarde » ? Peut-être est-ce par le recueil d’Espinosa, Flores de poetas illustres (1605) En tous cas, le gongorisme ne devait pas tenir une grande place dans l’œuvre ni même dans la pensée du réformateur français : « car l’estilo culto consiste en façons de parler trop personnelles ; et déjà, quel que soit le raffinement du fond, la communauté de l’expression, même délicate et travaillée, est requise chez nous. C’est une des conséquences de l’œuvre de Malherbe, que l’établissement de la société polie a encore consolidée[2] ». Et puis à cette époque, en France, le gongorisme n’était pas encore ce qu’on en fait dans certaines histoires littéraires ; il n’était du reste pas fait pour plaire à l’ennemi du marinisme ; et, comme Gongora devait surtout agir sur le genre burlesque[3], Malherbe n’en avait vraiment que faire. Il en est de même du théâtre espagnol, qui devait plus tard exercer une merveilleuse influence, et du roman ; et quant à d’autres auteurs espagnols alors répandus, le traducteur de Sénèque n’aurait pas trouvé de plus belles sentences que les latines dans ce Guevara qu’on lisait tant en France depuis le

  1. Ménage, o. c. : Malh., I, 96 ; Lanson, o. c. (Revue d’histoire littéraire de la France, 1896, p. 325) ; Tallemant des Réaux, Les Historiettes, 3e éd. par P. Paris et de Montmerqué, I, 296 et 319 ; Arnould, Anecdotes inédites, p. 61 ; id., Racan, p. 63.
  2. Lanson (Revue d’histoire littéraire, 1896, p. 323).
  3. Lanson, ibid., p. 326. Malherbe, on l’a vu plus haut, connaissait assez ce Martial auquel Lope de Vega comparait Gongora pour le sel de la plaisanterie.