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alors : il rappelle du moins cet auteur par la façon dont il parle du « peuple qui lui veut mal » (il est vrai que Pétrarque en parlait déjà), par les « contes d’honneur » et surtout par les « songes vains[1] », qu’il a supprimés dans la rédaction définitive :

Peuple qui me veux mal…
..........
Ces vieux contes d’honneur, invisibles chimères,
Qui naissent au cerveau des maris et des mères,
Etoient-ce impressions qui pussent aveugler
Un jugement si clair[2] ?

Ce n’était plus là que lieu commun, dès le XVIe siècle, et déjà Ronsard souhaitait à son ennemi une femme indocte et malhabile

Se poignant un honneur dedans son esprit sot[3].

On se représente l’amour comme les Italiens l’ont fait, et comme les Italiens on en fera une mer où l’amant est le navigateur — en attendant le royaume du Tendre. Ici encore Malherbe copie le Tasse :

  1. Malherbe, comme on l’a vu plus haut, connaissait assez Bembo pour relever dans Desportes « trois stances qui sont une pure pédanterie prise du Bembo », ou un vers « pris du Bembo, où il vaut aussi peu qu’ici » ; voici le passage Delle Rime di P. Bembo, terza impressione, p. 142 (Malh., I, 30) :

    Il pregio d’honestate amato e colto
    Da quelle antiche poste in prosa e’n rima
    Et le voci che’l vulgo errante e stolto
    Di peccato e disnor si gravi estima…
    Son fole di romanzi, e sogno ed ombra
    Che l’alme simplicette preme, e ’ngombra.

  2. Malh., I, 29-30 et variante.
  3. Ronsard, t. I, p. 400.