Page:Counson - Malherbe et ses sources, 1904.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 10 —

davantage, et qu’on retienne mieux, il a cherché de quelle image il pourrait revêtir sa pensée ![1] », mais encore il rappelle ailleurs que « toute une partie de la réforme de Malherbe n’a guère consisté qu’à remplacer l’imitation des modèles grecs par celle des modèles purement latins ?[2] » ; enfin M. Lanson, dans les pages pénétrantes qu’il consacre à Malherbe, écrit : « Il a l’imagination livresque de l’honnête homme qui a fait ses classes et vécu à la ville… Il a parlé de la mort : toujours on sent Horace, ou Sénèque, ou la Bible derrière lui[3] ».

Peut-être donc n’est-il pas sans intérêt d’examiner les sources de Malherbe, de voir exactement ce qu’il a emprunté à la Bible, aux Grecs et aux Latins, et aussi aux Italiens et aux Français, par lesquels les pensées et les images antiques lui ont souvent été transmises, de se demander enfin comment il comprenait ces diverses poésies et comment elles se conciliaient avec l’esprit classique alors en train de s’établir. Quelque part qu’il faille faire à Malherbe dans l’élaboration de cet esprit[4], les cinq mille trois cents

  1. F. Brunetière, La réforme de Malherbe et l’évolution des genres.
  2. id., Études sur le XVIIIe siècle : I. La formation de l’idée de progrès (Revue des deux mondes, 15 octobre 1892, p. 885).
  3. Histoire de la littérature française par G. Lanson (8e  éd., 1903), p. 355.
  4. Malherbe se trouve, ne fût-ce qu’en date, à l’origine de l’esprit classique, comme le dit déjà le grand théoricien de cet esprit : « On reconnaît la présence de cette forme fixe à divers indices, notamment au règne du style oratoire, régulier, correct, tout composé d’expressions générales et d’idées contiguës. Elle dure deux siècles, depuis Malherbe et Balzac jusqu’à Delille et M. de Fontanes » (Taine, L’Ancien régime, p. 211)