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avait été développée bien des fois depuis Guillaume de Lorris — un des bons élèves d’Ovide — jusqu’à Ronsard[1] : Malherbe la reprend encore, pour exprimer une autre pensée d’Ovide :

Mars est comme l’Amour : ses travaux et ses peines
Veulent de jeunes gens[2].


Ces vers sont bien dans le goût de l’humanisme, de même que la phrase d’une lettre à Peiresc : « Je suis vieux et par conséquent contemptible aux Muses qui sont femmes[3] ». Toutes ces expressions, comme « la fortune qui est femme et n’aime pas les cheveux gris », de Machiavel et de Charles-Quint, se retrouvent chez tous les imitateurs des anciens et des Italiens jusqu’à La Fontaine[4]. Le retour de la belle qui fait cesser l’orage[5], le désespoir d’Alcandre, qui fait songer à celui de Pyrame, et d’autres formules semblables peuvent venir

  1. Ne fût-ce qu’en présence du témoignage de Muret, il est probable ici qu’Ovide est, plutôt que Guillaume de Lorris, le modèle de Ronsard, qui a du reste connu le Roman de la Rose : v. Guy (Revue d’histoire littéraire de la France, 1902, p. 143).
  2. Malh., I, 282. Ce souvenir de Mars et d’Amour est familier à Malherbe. Après la guerre de Clèves, il écrit à Peiresc : « La saison de Mars est passée ; nous sommes en celle d’Amour, qui règne fort absolument. Ils ne valent tous deux rien ; mais encore le beau-fils vaut mieux que le beau-père ». (Malh., III, 103).
  3. Malh., I, 282. Quae bello est habilis, Veneri quoque convenit aetas. (Ovide, Amores, I, IX, 3-4).
  4. Ne cherchez point cette déesse (la Fortune),
    Elle vous cherchera : son sexe en use ainsi.

    La Fontaine, Fables, VII, 12.
  5. L’orage en est cessé ; l’air en est éclairci (Malh., I, 157).

    Protinus ex illa parterisit, et aether
    Protinus ex illa parte serenus erat
    (Ov., Fastes, IV, 6).