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Ce qui est vrai de Ménélas ne l’est pas moins d’Achille. On peut dire que le fils de Pelée se présente dans la mémoire de Malherbe comme dans la tapisserie de Pantagruel[1], « sa jeunesse descrite par Stace Papinie » (c’est ce que nous verrons plus loin), « sa mort et exeques descriptz par Ovide ».

N’eut-il pas sa trame coupée
De la moins redoutable épée
Qui fut parmi ses ennemis[2].


C’est bien ce que disaient les Métamorphoses[3] : et elles opposaient aussi sa gloire qui emplit le monde, au peu de cendre qui reste de lui dans la tombe, ce « je ne sais quoi » (nescio quid) qui fait songer à Tertullien et Bossuet[4]. Aussi Malherbe dira, après avoir décrit les talents d’Achille d’après Stace :

S’il n’eût rien eu de plus beau,
Son nom qui vole par le monde
Seroit-il pas dans le tombeau[5] ?

  1. Rabelais, Pantagruel, 4e, chap. II.
  2. Malh., I, 53.
  3. Mét., XII, 609.

    Au reste, un professeur de Caen avait composé sur Achille des vers qui pour Ménage (p. 367-8) valaient ceux d’Ovide.

  4. Jam cinis est, et de tam magno restat Achille
    Nescio quid, parvam quod non bene compleat urnam.
    At vivit totum quæ gloria compleat orbem.
    (Mét., XII, 615 sqq.)

  5. Malh., I, 113. « Le tombeau », et non « l’urne » : en traduisant Sénèque, Malherbe remplace aussi l’idée d’incinérer par enterrer.