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III. Horace.


« Oserais-je vous demander, Monsieur, si vous n’avez pas un grand plaisir à lire Horace ? — Il a des maximes, dit Pococurante, dont un homme du monde peut faire son profit, et qui, étant resserrées dans des vers énergiques, se gravent plus aisément dans la mémoire[1]. » Malherbe aurait souscrit au jugement de Pococurante, et il a « fait son profit des maximes » d’Horace. Celui-ci avait déjà fait l’admiration du XVIe siècle, et il sera encore l’un des modèles du XVIIe : mais tous les écrivains ne l’aiment pas pour la même raison.

Ne te sovient-il pas d’Oraces
Qui tant ot de sens et de grâces[2] ?

Les uns préfèrent le « sens » d’Horace, sa sagesse, ses « maximes », sa malice aussi et son bon sens bourgeois : et Malherbe, Boileau, La Fontaine sont de ce groupe. D’autres aiment surtout ses « grâces », son style élégant et aimable, les jolis tableaux qu’il sait faire, les tournures brillantes de son expression : tels sont Ronsard, qui « se rend familier d’Horace, contrefaisant sa naïve douceur »[3] Racan, l’agréable paraphraste du Beatus ille[4], et jusqu’à Musset lui-même. Entre les deux catégories

  1. Voltaire, Candide, chap. XXV.
  2. Roman de la Rose, éd. Fr. Michel, v. 6470.
  3. Ronsard, t. II, p. 10, et 223, III, 285.
  4. C’est le tableau de la vie champêtre que Racan a goûté dans Horace, ou plus exactement dans une traduction d’Horace.