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Par les bois et les prés les bergers de Virgile
Fêtaient la poésie à toute heure, en tout lieu[1].

Les poètes modernes se mirent à la suite de ces bergers, et depuis l’œuvre latine de Pétrarque jusqu’aux Italiens et aux Français de la période classique, ils ont répété, ou adapté à de nouveaux besoins, les dialogues de Tityre et de Mélibée et de leurs confrères en « bergerie ». Quand on eut renoncé aux ambitions épiques qu’inspirait l’Énéide autant que l’Iliade, on continua à admirer et à imiter les Églogues, et de l’Énéide elle-même on retint toujours quelques vers lapidaires, et des images poétiques. Celles-ci s’étalaient dans toutes les œuvres du poète latin en végétation luxuriante :

Et les cytises de Virgile
Ont embaumé tout l’univers[2].

On éprouvait particulièrement le besoin de recourir à un si précieux modèle, à une époque où la poésie française se sentait encore jeune et novice : Desportes, Duperron, Bertaut le traduisent, et même « feu M. le cardinal du Perron disoit souvent que nos rois devroient proposer un prix à diverses personnes de capacité choisie pour traduire à l’envi les plus dignes orateurs et poètes latins, sur tous Virgile ; étant d’un effet très fructueux à l’enrichissement de notre langue, d’essayer

  1. A. de Musset, Idylle (Poésies nouvelles, p. 122).
  2. Sully-Prudhomme, Stances et Poèmes, I, p. 8.