dans le salon, paraissant fort préoccupés et parlant d’une voix très basse afin de n’être pas entendus.
— As-tu parlé à Thérèse ? demanda Pierre.
— Oui, ce matin. Elle n’est pas disposée à se marier cette année, elle demande un an pour oublier son ancien ami et pour pleurer la disparition de son enfant. Après quoi elle sera prête à t’épouser si tu as encore la même intention.
— C’est impossible, nous ne sommes pas pour vivre cette vie-là encore un an.
— Pourtant il le faut.
— Oui, mais tu sais, tous les bruits que l’on fait à propos de la guerre, s’il fallait qu’elle éclate et moi encore garçon, que deviendrais-je ? Et toi ?
— C’est vrai je n’y avais pas pensé, nous allons donc parler à Thérèse demain et il faut qu’elle se décide.
Comme de fait, le lendemain on parla à Thérèse. On lui démontra tant de sincérité et de conviction qu’on finit par la convaincre et on lui fit accepter que son mariage eut lieu en juillet.
Le mariage n’eut pas lieu. La guerre s’étant déclarée plus tôt que l’on s’y attendait. Pierre fut donc obligé d’aller servir dans l’armée quoiqu’il eût bien voulu se cacher pour s’en exempter.
Le jour de son départ, on alla le reconduire et les adieux furent des plus touchants, mais si quelqu’un les avait remarqués il se serait sûrement aperçu qu’il y avait beaucoup plus de chaleur dans le baiser que Pierre donna à Jeanne que celui qu’il donna à Thérèse.
Revenus à la maison, au diner, M. Roy et Jeanne parlèrent beaucoup de Pierre, des dangers et les misères que les soldats endurent sur le champ de bataille. Thérèse seule demeurait silencieuse, car elle pensait beaucoup plus à son enfant qu’à Pierre. Et profitant de l’occasion ou la conversation était en suspens, elle demanda à son père ce qu’elle avait plus d’une fois demandé.
— A-t-on trouvé quelques indices sur l’enlèvement de mon enfant ?
— Non, toujours rien, et la prime que j’ai offerte n’a apporté aucun succès, mais nous ne devons pas désespérer car la justice est patiente c’est ce qui fait sa force. Tout la favorise contre les criminels un jour ou l’autre elle finira bien par mettre la main sur les coupables.