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pour en avoir. À l’automne Couillard, qui restait comme l’unique espoir de ses compatriotes, ne put donner à chacun, par semaine, qu’une écuellée d’orge et de blé d’Inde pesant environ neuf onces et demie. « Ainsi, dit M. de Champlain, fallut-il passer la misère de ce temps où je pâtissais assez. »

Durant l’hiver les hommes furent employés à couper du bois de chauffage et à le traîner sur la neige plus de mille pas. Les sauvages donnèrent bien quelques cerfs, mais il n’y en eut pas assez pour tout le monde. Bien plus les chasseurs envoyés de l’Habitation furent encore moins généreux. Ils en tuèrent un très gras et très gros et ils se mirent à le dévorer comme des loups ravissants ; ils n’en apportèrent que vingt livres.

Pour comble de malheur la provision de légumes s’épuisait malgré l’économie qu’on en faisait : « Je pensais, dit M. de Champlain, qu’il valait mieux mourir tout doucement de la faim que de manger tout à la fois pour mourir ensuite. » Au mois de mai, c’était un spectacle lamentable de voir quelques familles chargées d’enfants, de les entendre, pressées par la faim, crier et demander du pain à leurs parents, qui ne pouvaient trouver assez de racines pour les rassasier ; à peine en trouvaient-ils assez pour apaiser la moitié de leur faim, même en s’enfonçant dans l’épaisseur des bois à quatre ou cinq lieues de l’Habitation, et souffrant encore de l’incommodité des moustiques et de celle du temps.

Au mois de juin, les pois manquèrent tout à fait.