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que des transfuges huguenots ; elle demeura sur les dix arpents de terre que son mari avait fait fructifier de son travail, arrosés de ses sueurs, sur lesquels il avait fondé le repos de ses vieux jours, l’avenir de sa famille, la perpétuité de sa postérité. Qu’importe si les motifs de sa stabilité étaient intéressés : l’histoire dit qu’elle voulait recueillir les fruits de la semence déposée le printemps dans son petit domaine ? Mais ne cédait-elle pas non plus au cri de ses entrailles ? Son principal, ou plutôt, son unique intérêt ne reposait-il pas aux sources les plus pures et les plus généreuses de son cœur de femme ? Il y avait là, le pain de ses enfants, et les fruits de tant de sacrifices ! Il y avait là, un foyer d’amour, un toit paternel, un sanctuaire de tous les souvenirs bénis de la famille ! Car c’est là qu’avait été consacré le premier mariage et bénie la première naissance, et le tombeau de sa fille Anne, et de son époux, Louis Hébert ; non, cette pauvre veuve, en regardant s’éloigner la France aimée, dans son délaissement volontaire, nous donnait un exemple sublime que nous aurions à suivre plus tard, et nous révélait, en le résumant tout entier dans sa personne, le mystère de la survivance providentielle des nations sur le sol qu’elles ont baptisé de leurs sueurs et rendu productif et bienfaisant. En semant son maïs et son froment, la veuve Hébert avait planté les germes de sa patrie nouvelle, elle avait contracté un pacte et une union avec cette terre dont elle avait fécondé le sein, elle voulait y rester fixée, malgré son aversion