Page:Coudriet, Chatelet - Histoire de Jonvelle et de ses environs, 1864.djvu/113

Cette page n’a pas encore été corrigée

ne peut s’expliquer que par les envahissements et les brigandages exercés sur les domaines de l’abbaye, pendant les guerres presque continuelles des années précédentes. Ces injustices furent sans doute réparées par Philippe, ou avant lui par ses parents, et ce généreux abandon, qui le mettait comme à la merci de l’abbé, n’aurait été qu’une garantie contre les torts à venir. Au reste, ces concessions lui furent payées soixante livres comptant, de bonne monnaie, à deux deniers l’engrogne du roi.

A part cet acte, les documents historiques sont muets sur Philippe de Jonvelle, jusqu’en 1354. Mais cette date est importante dans notre histoire ; car c’est celle de la charte des franchises accordées par le seigneur aux sujets de sa terre, en particulier à la ville de Jonvelle. Pour en bien comprendre le sens et la portée, il est nécessaire d’entrer préalablement dans quelques appréciations sur la véritable situation civile des classes inférieures, pendant le règne de la féodalité[1].

Il est faux, comme l’ont prétendu quelques historiens et même des jurisconsultes, que les vainqueurs aient réduit en servitude tous les naturels du pays, et que la conquête des Gaules ait eu pour résultat de partager la France en deux classes, celle des Francs, seigneurs et gentilshommes, et celle des gallo-romains, leurs esclaves ; en un mot, que le règne féodal ait été la suite immédiate de l’invasion. A la vérité, les rois mérovingiens, que la conquête avait rendus maîtres des domaines considérables

  1. Voir sur cette question Curasson, Discours de réception à l’Académie de Besançon (1840), et Discours prononcé à la séance du 18 janvier 1841.