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secourir Genève, les Bernois s’emparèrent de Lausanne et s’y établirent en despotes en lui imposant la Réforme.

La résignation avec laquelle les habitants se plièrent au double joug qui pesait sur eux les montre alors manquant d’ardeur sinon d’endurance. Il y avait pourtant en ce temps une « Abbaye » ou réunion de jeunes gens qui se livraient deux fois la semaine à des exercices guerriers. Par malheur cela finissait souvent en saturnales et ces garçons couraient la ville tout nus en chantant des chansons impudiques jusque vers certain quartier où les hétaïres, reconnaissables à des galons cousus sur la manche, vivaient parquées. La rigidité bernoise eut finalement raison de ces païennes effervescences. Une ère terne et grise commença. Les « Messieurs de Berne » se réservèrent toutes les fonctions rémunératrices. Il ne resta aux Lausannois que l’enseignement ou le pastorat. Ceux qui avaient de la « sortie » s’en allèrent au loin faire des affaires ou conduire des batailles. Et plus d’un y gagna fortune et gloire — et parfois les deux.

L’arrivée des réfugiés français chassés de leur pays par la révocation de l’Édit de Nantes fut le signal d’un réveil général. Le commerce, l’agriculture s’en trouvèrent grandement améliorés. Des industries naquirent. Partout l’esprit d’initiative se manifesta. Mais le patriotisme local continua de sommeiller ; la généreuse tentative du major Davel (1723) pour émanciper ses concitoyens et qu’il paya de sa vie n’eut point de lendemain. La chose est d’autant plus surprenante que le souvenir était encore proche des fallacieuses promesses faites par le gouvernement bernois lors de la « Guerre des Paysans ». Cinq mille Vaudois avaient naïvement prêté main forte à leurs maîtres et Lausanne n’en avait retiré aucun des avantages convenus. Cependant le peuple ne suivit pas Davel. Il fallait pour le décider l’élan donné par les voisins de France. Ce fut seulement le 24 janvier 1798 que le drapeau vert et blanc de la République Lémanique flotta sur Lausanne.

Les caractéristiques de la Lausanne moderne était déjà visibles au xviiie siècle. De tous les coins du monde on y venait séjourner. De jeunes Anglais et de jeunes Allemands y parachevaient leur éducation. Le célèbre docteur Tissot dont