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ments. C’est ce dont se préoccupe M. Marion. « Comment, dit-il, modifier le type militaire sur lequel le lycée a été d’abord conçu, au point d’en faire une école d’autonomie pour les volontés ? Sans doute, c’est aussi une préparation à la vie libre que de s’habituer à obéir ; mais cette préparation est vraiment trop indirecte. Obéir, faute de pouvoir faire autrement, non sans saisir de loin en loin les occasions de révolte, n’est-ce-pas, en somme, tout le contraire de savoir se gouverner ? Plier la jeunesse à l’obéissance ne saurait donc être, tout le monde le sent, le meilleur moyen de former la bourgeoisie d’un pays libre. » M. Marion prend soin d’ajouter qu’il ne s’adresse pas à ceux « qu’un idéal social et pédagogique tout autoritaire rend aveugles aux besoins nouveaux de notre pays, défiants de la raison et sceptiques sur les bienfaits de la liberté ». Ceux-là, il désespère de les convertir et de leur faire comprendre « qu’adjurer les proviseurs de tout faire pour créer un esprit moral, un véritable esprit public dans leur maison, c’est simplement les rappeler à la vérité et à la beauté de leur rôle d’éducateurs ». Cette transformation de la discipline est un grand mouvement, et les grands mouvements s’opèrent d’abord dans les bas-fonds ; lorsqu’ils éclatent sur les sommets, ils sont déjà à moitié accomplis. Quand le public a appris par le dépôt d’une loi que les universités régionales allaient renaître, il a cru que l’idée était nouvelle : il ignorait le travail continu opéré depuis vingt ans par ceux qui avaient à cœur le relèvement de l’enseignement supérieur. De même ce n’est pas un décret qui établira le nouveau régime disciplinaire, si les bases n’en ont pas été dès longtemps préparées par des modifications de détail. L’association athlétique en facilitera l’établissement : c’est là, pour employer les termes d’une circulaire ministérielle[1], « une de ces réformes d’apparence modeste » qui exercent une plus grande influence que bien des révolutions bruyantes ou des événements sensationnels.

Je vous proposerai, Messieurs, d’étudier la genèse de ces associations. Nous pourrons nous rendre compte ainsi des fenêtres à ouvrir pour laisser entrer le nombre de mètres cubes d’air nécessaire à leur développement.

  1. Circulaire de M. Faye, en date du 28 mars 1888.