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et ne les préserva point d’ailleurs de verser à leur tour dans l’intolérance et la persécution, se mua après la fondation des premiers États continentaux (Kentucky, Ohio, Tennessee), après l’acquisition de la Louisiane et la guerre contre le Mexique, en une aspiration de plus vaste envergure. Il ne s’agissait pas seulement d’utiliser et de fertiliser les immenses territoires dont le traité de Guadalupe Hidalgo assurait la possession à la jeune république, mais d’y former une société de liberté et de justice capable de régénérer l’univers. Et, le mysticisme aidant, les Américains se prirent à espérer la seconde venue du Christ qui choisirait le Nouveau-Monde pour y parachever son œuvre. Ce fut la guerre de Sécession qui vint, crise formidable où la conscience l’emporta sur l’intérêt et d’où les États-Unis sortirent mûris pour leur mission future. D’abord timide essaimage européen vivant comme en exil sur les côtes de l’Atlantique, bientôt puissance continentale grisée par son brusque agrandissement et l’ampleur de ses nouveaux destins, désormais nation pondératrice acceptant sa part de responsabilité dans la politique universelle, voilà les trois actes d’un beau drame.

J’ai divisé différemment le drame sud-américain : un prologue, la civilisation précolombienne avec ses grandeurs, ses mystères et ses étrangetés. Le premier acte est celui de la découverte et de la conquête, acte bref, puisque les trente premières années du 16me siècle y suffisent ; puis viennent — second acte — trois cents ans de domination et d’exploitation espagnoles. Le troisième acte est celui du grand effort émancipateur (1810 à 1826) dont les acteurs sont Bolivar, Miranda, Sucre, San-Martin… Un quatrième acte long et décevant s’ou-