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mémoires les jalons d’une vue de l’antiquité classique plus conforme à la réalité que celle qu’on nous avait donnée au collège.

Toute cette culture antique faillit sombrer avec la morale imparfaite et inégalitaire qu’elle servait. Il n’y a point de doute qu’on soit redevable à l’Église d’en avoir sauvé les plus riches épaves. Mais, après avoir loué de saint Jérôme à Cassiodore les instigateurs de ce bienfait, M. de Labriolle, dans sa conférence : Culture antique et christianisme, a été heureusement inspiré de détourner un moment notre reconnaissance des rives de la Méditerranée pour faire une juste part dans le mérite du sauvetage aux moines d’Irlande et d’Angleterre, dont l’action est si souvent laissée dans l’ombre. Cela dit, il faut convenir que ce n’est pas en général l’enthousiasme pour les lettres grecques et latines qui incita les écrivains sacrés. Beaucoup d’entre eux, sinon la plupart, obéirent à des mobiles moins limpides. M. de Labriolle ne l’a point célé. Et sans doute, s’il en avait été autrement, le sauvetage eût-il été plus complet. Tel qu’il est, il vaut que le monde moderne s’incline avec une gratitude sincère devant ceux qui l’ont accompli.

Au moment où échoue définitivement la dernière tentative pour établir en Occident une hégémonie impériale, il est particulièrement intéressant de suivre à travers les âges cette survivance de l’idée romaine qui a sans doute encore plus contribué à troubler l’Europe qu’à la façonner. Avant Charlemagne on peut dire que les peuples occidentaux étaient comme en « mal d’empire. » D’une restauration césarienne ils attendaient un retour de cette pax romana perdue depuis tant de