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bien différents de ce que l’antiquité avait ainsi nommé et poussant parfois les prétentions scientifiques jusqu’aux frontières de la pédanterie, mais dans lesquels peu à peu le sport pénétra en vainqueur. C’était bien le descendant du sport hellène : il disposait seulement, grâce aux inventions et aux progrès modernes, d’engins ingénieux et de moyens nouveaux. Son domaine technique se trouvait considérablement agrandi et sa formule précisée. C’était « le culte habituel et voulu de l’effort musculaire intensif appuyé sur le désir du progrès et pouvant aller jusqu’au risque ». Telle est sa définition : elle renferme les idées de volonté, de continuité, d’intensité, de perfectionnement et de danger éventuel ; ces cinq éléments sont constitutifs du sport. C’est par là qu’il est fonction de puissance et se rattache en même temps à la philosophie stoïcienne vers laquelle il peut conduire ses adeptes. C’est à ce sport-là que je songeais lorsqu’il y a trente ans, je nouai avec Jules Simon un pacte pour le rebronzage de la France. La conviction du philosophe septuagénaire n’était pas moins ardente que la mienne et l’avenir a répondu à nos espoirs. Une éducation plus virile et plus large eut bien vite engendré des résultats aussi féconds que ceux dont l’Angleterre de Thomas Arnold avait naguère recueilli le bénéfice. En vain des Français aveuglés par l’esprit de parti se sont-ils donné la triste mission de dépeindre au dehors une décadence qui n’était qu’en eux-mêmes. L’histoire fixera le tracé de la courbe ascendante qui a permis à la République d’écrire en quarante ans la plus admirable des épopées coloniales et de conduire la jeunesse à travers les dangers d’un pacifisme et d’une liberté poussés à l’extrême jusqu’à