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productions du génie païen, s’est montrée sévère à l’égard de la culture corporelle, poursuivant en elle la source de cet « orgueil de la vie » auquel l’Écriture avait jeté l’anathème. Ne nous indignons pas. Au regard de l’Histoire, son action est justifiée ; le monde d’alors avait besoin d’ascétisme ; le luxe et la ploutocratie le menaçaient de mort. Par contre, de nos jours, parce que nous portions le poids de cette période de philosophie ascétique qui fut trop longue et trop lourde, il a fallu retourner vers l’éducation du corps au risque plus tard d’aller trop loin dans cette voie. Car l’humanité est semblable au pendule qui aspire à l’équilibre et ne l’atteint que passagèrement sur sa route infatigable d’un excès à l’autre.

Même après que l’édit de l’empereur Théodose, en supprimant les Olympiades antiques, eut suspendu le cours des traditions athlétiques, il subsista ça et là de modestes gymnases où s’attardaient des amateurs obstinés, mais que n’éclairaient plus les reflets de la beauté artistique et de l’effort intellectuel, l’esprit ayant divorcé d’avec le muscle. Cette époque obscure mériterait des recherches. J’aurais voulu les amorcer ; je n’y réussirai pas et souhaite que d’autres aient cette ambition. Qui sait si elles n’aideraient pas à mieux saisir le caractère et la portée des sursauts d’énergie dont, à maintes reprises, à travers les mille ans de son existence agitée, l’empire grec nous présente le captivant et mystérieux tableau.

Plus connues de nous, encore qu’insuffisamment étudiées, sont les manifestations de l’esprit sportif au Moyen-Âge. Car en travaillant à réglementer la Chevalerie, l’Église dut, pour un temps, se départir