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à travers l’histoire sud-américaine

la Nouvelle-Grenade. En juillet de la même année le Chili se souleva. Lima restait le centre de la résistance monarchique et cette résistance était puissante. L’année 1811 vit naître deux républiques ; celle du Paraguay, que constitua le dictateur Francia et qui allait se développer solitairement de si étrange façon, et celle du Venezuela proclamée à Caracas le 5 juillet et qu’un retour offensif du royalisme allait détruire presque aussitôt. C’est à ce moment que se dessine la noble et vaillante mais parfois un peu déconcertante figure de Simon Bolivar. Né à Caracas en 1783, élevé à Madrid par les soins de son oncle le marquis de Palacios, Bolivar avait épousé à dix-huit ans sa cousine, fille du marquis del Toro. La douleur d’un veuvage prématuré, de fructueux voyages en Europe et aux États-Unis mûrirent rapidement l’âme de ce jeune gentilhomme qui semblait promis à une existence facile. On dit qu’à Rome, sur le mont Sacré, il fit le serment de se vouer à l’émancipation de sa patrie. Le serment fut tenu avec une persévérance admirable. Car au début de cette retentissante aventure, les échecs ne manquèrent pas : échec diplomatique en Angleterre où Bolivar avait espéré obtenir des secours armés ; échec militaire en Amérique où le Libérateur rentré vainqueur dans Caracas en août 1813 se le vit de nouveau enlever l’année suivante.

Cette date de 1814 semblait devoir marquer la fin des espoirs autonomistes. Le parti de l’indépendance, affaibli par la restauration de Ferdinand vii sur le trône métropolitain aussi bien que par la désunion des créoles, l’indifférente inaction des Indiens et les difficultés de combiner les forces entre des groupements séparés par d’énormes distances, venait de reperdre toutes ses conquêtes. Le Mexique qu’on avait cru définitivement émancipé était lui-même retombé sous le joug. Il ne restait que la province de Buenos-Ayres dont les troupes venaient même de s’emparer de Montevideo, mais des divisions intestines y faisaient le jeu des royalistes.