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à travers l’histoire sud-américaine

Bien souvent les chroniqueurs se sont demandé ce qu’il fallait penser des descriptions enthousiastes rapportées par les conquérants espagnols. Tout porte à les croire non véridiques mais sincères. Les séductions de la nature, l’aspect certainement prestigieux des grandes cités américaines et de l’ordre qui y régnait devaient émouvoir des hommes récemment échappés aux angoisses et aux privations d’un pénible et long voyage. Surtout le reflet de l’or transformait toutes choses à leurs yeux. L’or était partout ; il affolait par sa seule présence les aventuriers qui s’étaient grisés par avance du désir qu’ils en avaient.


ii


L’avant-dernière année du quinzième siècle, Christophe Colomb, qui depuis six ans avait découvert des îles (Bahamas et Antilles) mais non point la terre ferme, reconnut, au cours de son troisième voyage, l’embouchure de l’Orénoque. Les eaux du fleuve immense se projetaient à trois lieues en mer. Colomb augura la présence d’un vaste continent, mais il continua de penser qu’il s’agissait de l’extrémité orientale de l’Asie. Il devait mourir en 1506, sans savoir que ce continent n’était point l’Asie. En 1513, seulement, Balboa traverserait l’isthme de Panama et, entrant tout armé dans les flots du Pacifique, en prendrait possession au nom du roi d’Espagne. Dès le 1er mai 1499, Cabral avait ainsi pris possession du Brésil pour la couronne de Portugal. Ces gestes naïfs expriment bien l’état d’âme des aventuriers venus à la suite de Colomb et qui, en l’espace de quelques années, avaient exploré les côtes du Yucatan, du Honduras, de la Colombie, l’embouchure de l’Amazone, celle du Rio de la Plata, pénétré dans la baie de Rio de Janeiro et allaient tourner la Patagonie par le détroit de Magellan et bientôt remonter le long des côtes chiliennes.