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Je pouvais me dévouer, corps et âme, à mes fonctions, ayant cessé la publication de la Revue Athlétique pour la fusionner avec les Sports Athlétiques qui s’éditèrent dès lors chez Delagrave. La vaillante audace d’Adolphe de Pallissaux méritait bien cette solution qui, sans diminuer ses peines, lui apportait du moins la sécurité. La saison de football fut superbe. Nous n’étions plus réduits (la pelouse de Madrid prise par la Ligue qui du reste, n’en avait jamais fait grand chose et n’en faisait plus rien du tout) à ces bribes de prés situés près du lac supérieur du Bois de Boulogne et dont un arbre homicide occupait le centre. Oh ! le misérable, il était laid et rabougri ; on jouait autour et les joueurs à tout instant se cognaient à lui rudement. Je tremblais qu’il n’occasionnât quelque jour un accident terrible. Trois fois j’avais demandé à M. Alphand sa disparition et ce qu’il y a de plus fort, c’est qu’elle m’avait été accordée ; le conservateur du bois, M. Caillas, n’y était nullement hostile. L’arbre condamné pourtant ne tomba pas ; à ma troisième visite, M. Alphand s’était mis Henri Lepère
m. henri lepère
Président de l’Union des Sociétés d’Aviron
à rire. « Est-ce que vous venez encore pour l’arbre ? me dit-il ; mais il doit être abattu depuis longtemps ». Eh non ! il ne l’était pas. Le directeur des travaux de Paris décréta sa mort à nouveau mais il mourut lui-même avant son arbre qui tenait bon il y a encore quelques années. Ce cauchemar avait pris fin par un arrangement avec le Jardin d’Acclimatation, adjudicataire des foins de la prairie de Bagatelle. C’est là que se jouèrent les matches de 1892. On pouvait en faire deux à la fois ; le terrain était bon. Nous étions ravis. Le 20 mai eut lieu le match final du championnat interclubs. Le Racing triompha du Stade. Un punch suivit, au restaurant de Madrid. J’y remis aux vainqueurs le challenge