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Celle-ci se proposait de l’aménager et M. Bassinet, alors conseiller municipal du quartier de Vaugirard, avait été chargé du rapport sur les travaux à effectuer. Il concluait à l’établissement de chaque côté de la galerie dite de trente mètres, de deux pistes entourant des pelouses de jeu, puis au delà de « quinconces » pour la paume et le tennis. Il ajoutait que ce projet recevait déjà des sociétés intéressées l’accueil le plus enthousiaste. Seulement, on avait oublié de les consulter sur le détail technique des aménagements. Je demandai une audience à M. Alphand qui me montra les plans, prit note de mes observations et me promit qu’une commission composée des représentants des diverses sociétés intéressées aurait à donner son avis définitif. Effectivement, la commission fut constituée ultérieurement ; elle se réunit une fois et s’évanouit en bonne commission officielle qu’elle était et, quand les terrains du Champ-de-Mars furent enfin livrés à la jeunesse, on s’aperçut qu’ils étaient amèrement défectueux. On les utilisa néanmoins pendant quelques années pour jouer au foot-ball ; les écoles primaires où la rage du sport succéda un moment à celle de l’exercice militaire, les disputèrent d’ailleurs âprement aux lycéens. Ils disparurent avec les premiers préparatifs de l’exposition de 1900. J’avais toujours eu l’espoir d’obtenir là une concession permanente pour le Stade mais mes efforts ne devaient aboutir qu’à lui ménager des droits intermittents et insuffisants.

Le 25 mars, l’Union fit sa visite annuelle à l’Élysée ; je priai cette fois M. le général Lewal et M. Heywood d’y venir avec moi. Le président Carnot nous accueillit avec sa bienveillance coutumière et promit, sur nos instances, de venir au Bois de Boulogne, non plus officiellement cette fois mais « en simple promeneur ». Je dois confesser ici la petite gaminerie dont je me rendis coupable en cette occasion. Le jeudi 12 avril, l’association du lycée Michelet donnait ses championnats sur le terrain du Racing-Club. Les élèves m’écrivirent une dépêche ce matin-là, très indignés d’apprendre que leur proviseur n’assisterait pas à la fête. Je courus à l’Élysée et, par l’entremise d’un officier d’ordonnance, je rappelai au Président sa promesse, suggérant que nulle occasion n’était meilleure pour la remplir que celle des championnats de Michelet. M. Carnot me fit répondre qu’il viendrait très probablement mais qu’il ne voulait pas que personne le sut. Effectivement il arriva vers trois heures, passa une heure au milieu de nous et nous quitta, chaudement acclamé par une assistance enthousiaste. Qui fut bien ennuyé le soir d’apprendre ce qu’il avait manqué ?