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sur le paquebot le Sénégal. Cette croisière eut lieu et avec succès, grâce, si je ne me trompe, à la Revue générale des Sciences qui se substitua à la Compagnie elle-même. Un traité stipulait que la maison Cook mettrait en tous pays et de façon spéciale ses agences et ses représentants à la disposition des personnes désirant se rendre en Grèce. Malgré tous nos efforts, un petit nombre de Français se décidèrent. Quand aux concurrents, il eût fallu pour les inciter à tenter ce premier voyage quelques subventions. Nous eûmes beaucoup de difficulté à les obtenir. Ce fut M. Fabens qui y parvint à la fin, à force de vouloir et de persévérance. Et il se mit à la tête de l’équipe française pour l’amener à Athènes. En Suède et en Hongrie, les choses allèrent aisément ; nos collègues Kemény et Balck réussirent fort bien. De même le professeur Sloane qui provoqua la venue d’Amérique de deux fortes équipes. En Belgique, la campagne menée contre nous par la Fédération de gymnastique avait porté des fruits et le comte de Bousies m’écrivait qu’il s’était heurté à l’hostilité des uns, à la froideur des autres ; seuls quelques cyclistes belges étaient annoncés. L’activité de nos collègues anglais, doublée de celle de M. Mano qui séjournait alors à Oxford, ne produisit pas grand chose. J’avais de mon côté, adressé aux principaux journaux britanniques des lettres pressantes faisant appel au concours des principales sociétés anglaises. En général, les journaux accompagnèrent la publication de ce document de réflexions sympathiques mais mêlées d’un brin d’ironie ; ils ne croyaient pas aux Jeux Olympiques ; par contre ils préconisaient des jeux pan-britanniques périodiques et conseillaient de les organiser sans délai. En mon for intérieur, j’estimais qu’il viendrait à Athènes une centaine de concurrents et quelques milliers de spectateurs étrangers ; et je jugeais que, pour les débuts de l’athlétisme international, c’était là un très beau résultat, mais je n’osais en rien dire à mes amis hellènes, voyant que les ambitions athéniennes croissaient chaque jour et n’étaient plus du tout au diapason de la réalité.

Il arriva en ce qui concerne l’Allemagne le plus étrange incident. N’ayant pas participé au congrès de 1894, elle n’avait pas de représentant dans le Comité International mais, étant donné le fait que le prince royal était le beau-frère de l’empereur Guillaume, personne n’avait pensé à Athènes qu’il pût être difficile d’obtenir le concours des principales sociétés germaniques. M. Rangabé ministre de Grèce à Berlin avait, à cet effet, formé une commission placée sous la présidence du prince Philippe de Hohenlohe,