Page:Coubertin - Une campagne de vingt-et-un ans, 1909.djvu/134

Cette page a été validée par deux contributeurs.


xiii

LA PREMIÈRE OLYMPIADE



Presque tout ce qui se fit de bon dès lors à Athènes fut l’œuvre personnelle du prince royal. Il y apporta une volonté persévérante et un souci quotidien. Par malheur, son collaborateur principal n’était point à la hauteur d’une tâche à laquelle il est juste de reconnaitre que rien, dans son passé, ne l’avait préparé. M. Philemon constitua un véritable ministère olympique. On ne saurait croire la multiplicité des rouages bureaucratiques qui s’enchevêtrèrent autour de lui. Il en résulta une abondante et stérile paperasserie et un énorme gaspillage. Le travail d’ensemble auquel présidait le prince resta excellent ; les efforts de détail qu’il ne pouvait surveiller se perdirent dans le dédale administratif imprudemment créé. Il est vrai que les Jeux étant désormais assurés de la faveur des pouvoirs publics, c’était à qui trouverait moyen d’y demander son bout de rôle et de participer à leur préparation. Tout le monde voulait entrer dans le « ministère Philemon ». Par ailleurs, on se grisa quelque peu du succès financier qui s’esquissa tout de suite. Dès le 19 février 1895, M. Philemon m’informait que 130.000 drachmes étaient déjà souscrites. J’avais demandé avec instances à M. Syngros, un richissime athénien, d’amorcer la souscription mais il se laissa devancer par M. Schilizzi de Constantinople qui donna dix mille drachmes ; M. Syngros écrivit le lendemain qu’il en donnait autant. Les dons se multiplièrent très rapidement. Les colonies grecques de Marseille, d’Alexandrie, de Londres tinrent à honneur, comme je l’avais bien pensé, de témoigner de leur patriotisme dans une pareille occasion. Le gouvernement hellène, d’autre part (il était transitoirement aux mains de M. N. Delyanni, ancien et futur ministre à Paris et allait revenir à M. Th. Delyanni, chef d’un des grands partis politiques) se montrait disposé à autoriser une émission de timbres-poste spéciaux dits olympiques dont le produit irait à la caisse des Jeux ; cela valait bien mieux à tous points de vue que la loterie refusée par le cabinet Tricoupis.