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loin, dès lors surtout que l’heure avait sonné où l’internationalisme sportif paraissait appelé à jouer de nouveau son rôle dans le monde.

Le 25 novembre 1892, à l’occasion du « jubilé » de l’Union des Sports athlétiques dont j’ai parlé plus haut, une conférence en trois parties avait eu lieu à la Sorbonne ; « les exercices physiques dans l’antiquité, au moyen-âge et dans le monde moderne » en formaient le sujet. Je terminai mon tiers de conférence (MM. Georges Bourdon et Jusserand s’étaient chargés des deux autres) par les paroles suivantes : « Exportons des rameurs, des coureurs, des escrimeurs : voilà le libre-échange de l’avenir et, le jour où il sera introduit dans les mœurs de la vieille Europe, la cause de la paix aura reçu un nouvel et puissant appui. Cela suffit pour encourager votre serviteur à songer maintenant à la seconde partie de son programme ; il espère que vous l’y aiderez comme vous l’avez aidé jusqu’ici et qu’avec vous il pourra poursuivre et réaliser, sur une base conforme aux conditions de la vie moderne, cette œuvre grandiose et bienfaisante : le rétablissement des Jeux Olympiques ». Je m’étais attendu à des critiques, à de l’hostilité mais le projet ne fut pas même relevé ; « qu’avez vous donc voulu dire en parlant de rétablir les Jeux Olympiques ? me demandèrent à la sortie quelques personnes… On ne comprenait pas le sens d’un pareil anachronisme ; on pensait que j’avais employé une locution symbolique. Je dus me rendre compte que, faute de s’être longtemps promenés comme moi en esprit autour de l’exèdre d’Hérode Atticus et du tombeau de Pelops, mes auditeurs plaçaient les Jeux Olympiques dans leur musée mental au même niveau que les mystères d’Éleusis ou l’oracle de Delphes ; choses mortes qui ne peuvent revivre qu’à l’Opéra.

Cette découverte me rendit prudent. Impossible de présenter le plan à l’opinion tout de go car, au lieu de se regimber, elle se contenterait d’en sourire. Il y avait dans nos cartons unionistes une proposition émanant d’Adolphe de Palissaux et tendant à la convocation d’un congrès international pour l’étude des questions d’amateurisme. Nous reprîmes, lui et moi, ce projet, et au cours de 1893 nous en fîmes admettre le principe par l’Union. Je rédigeai le programme préparatoire que je présentai au Comité le 1er  août 1893. Le Congrès était fixé à juin 1894. Son titre était : « Congrès International de Paris pour l’étude et la propagation des principes d’amateurisme ». Trois commissaires avaient charge de le préparer : C. Herbert, secrétaire de l’Amateur Athletic Association pour