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LE REDRESSEMENT DE L’AXE


10 août 1903.

Un incident récent s’est produit autour d’une statue ; c’est incroyable à combien d’incidents peut donner lieu, chez nous, le fait d’élever un monument à un homme notoirement illustre ; je dis notoirement car, s’il s’agit d’une célébrité discutable, la chose passe comme une lettre à la poste. Pierre Leroux, Étienne Marcel ou Armand Carrel se sont installés sur leurs piédestaux respectifs sans que personne y trouvât à redire ; mais pour Renan, Taine ou Jules Simon c’est une tout autre affaire : les différents « blocs » s’émeuvent aussitôt et se mettent à rouler sur les pentes de l’opinion, si j’ose employer cette métaphore hardie. La dernière victime d’un si fâcheux état d’esprit[1] s’est vu marchander les honneurs auxquels elle a droit, en considération d’une faute exceptionnellement grave : elle a manqué, en son vivant, au respect que tout Français et aussi — pour parler le langage actuel — tout « citoyen de l’humanité » doivent à notre sainte Révolution !

Il faut convenir que, de ce respect, les Français ne sont point avares ; mais il en va différemment des autres citoyens de l’humanité. Ceux-là professent en général sur ladite Révolution des opinions dont on ne se doute guère à Paris, ni même à Landerneau. Parbleu ! direz-vous, ces gens sont jaloux ; c’est la haine qui les étouffe. Mon Dieu, non ! Je

  1. Taine.